La première semaine du nouveau
président a été consacrée à la mise en place du gouvernement et aux premières
visites imposées. Avec la seconde arrive le moment des premières décisions et,
tout naturellement, des premières difficultés. Nous avons retenu cinq sujets
qui donnent un début d’éclairage sur la méthode Macron.
Moralisation de la politique ou
politisation de la morale ?
Conformément à l’engagement pris par le candidat, la procédure est déjà
en cours avec la remise au gouvernement du plan Dosière (René Dosière est
député apparenté socialiste) qui servira de base au projet de loi.
Mais un début de polémique est lancé qui risque, comme souvent en
France, d’être l’arbre qui va cacher la forêt.
Qui est en charge du projet de loi ? Le garde des sceaux François
Bayrou. Or deux jours à peine après sa nomination il est renvoyé en
correctionnelle devant la 17ème chambre de Paris (le 10 janvier 2019 seulement, on aura tout le temps d'oublier !)).
Le Monde qui traite de la nouvelle a ce commentaire bien conforme à
l’esprit du journal : « De mémoire de magistrats, cela ne s’était jamais vu....
S’il est encore ministre de la justice à cette date, il se retrouvera face à un
procureur sur lequel il a un pouvoir de nomination, ce qui risque de soulever
des questions. » Une manière de dire que c’est un sale coup pour lui et pour le
Président qui l’a désigné. Oh, l’affaire n’est pas bien grave, il ne s’agit que
d’une plainte en diffamation contre le maire de Pau.
À Matignon, où l’on apprend vite la langue de bois politicienne, on
affirme que « L'honnêteté et l'intégrité
de François Bayrou ne sont pas mises en cause dans cette affaire, il n'y a pas
de sujet ».
Admettons, mais la diffamation est un délit, sans doute un délit mineur
mais un délit tout de même. Par chance, ou par pur hasard, le projet Dosière
prévoit de manière explicite qu’une condamnation pour diffamation n'aurait pas
de sanction politique. On se demande si Bayrou retiendra cette proposition.
Tout de même, un ministre de la justice jugé par des magistrats et susceptible
d’être condamné par un tribunal...
Chirac disait que "les emmerdements volent en escadrille".
Cette deuxième semaine a donné lieu à une seconde affaire qui touche cette fois
Richard Ferrand, le ministre de la cohésion des territoires, très proche du président. L’affaire remonte à 2011 quand il était directeur général des Mutuelles de Bretagne. On lui reproche
d’avoir favorisé son épouse dans le montage financier d’une opération
immobilière (et juteuse) permettant à cette dernière de louer des locaux à la
mutuelle. Et ce n’est pas tout, le "canard" dispose d’un fusil à deux
coups dont le second a pointé un emploi d’attaché parlementaire que son fils a
occupé 4 mois, début 2014 pour 6.800€ nets.
Cela ne vous rappelle rien ? Primo, l’opération immobilière n'a rien
d’illégal, même s’il reconnaît que «ça tombe mal car cela crée de la suspicion
dans un contexte de suspicion» ; secundo, pour son fils, «si c’était à refaire il ne le referait pas.»;
tertio, une gaffe de son cabinet : «Je vous invite à aller faire un tour en
Centre-Bretagne. Ce n’est pas simple de trouver un jeune, volontaire, pour
travailler cinq mois, qui sait lire et écrire correctement, aller sur
Internet.» Les bretons apprécieront…
Pas de panique. Le parquet national financier a annoncé qu'il
n'ouvrirait pas d'enquête. Comme dans une affaire un peu similaire, il réagit
très rapidement, mais pas dans le même sens.
Matignon affirme que "l'honnêteté de Richard Ferrand n'est pas en
cause." Il ne reste plus qu'à espérer que le canard n'a pas d'autres
cartouches pour les semaines à venir ...
Premiers chocs entre la morale et la nécessité
politique. Selon que vous serez puissant ou misérable, de la majorité ou de
l'opposition, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir...
De minimis non curat praetor
Invité de "L'émission politique", le 6 avril sur France
2, Macron a déclaré à propos de Notre dame des Landes. « Il y a eu un
vote, mon souhait est de le respecter et de faire l'aéroport.» Certes, il a précisé qu'il se donnerait six mois pour convaincre les
Zadistes qui occupent les lieux : « Je ne vais pas arriver et envoyer les
militaires. La nomination d'un médiateur calmera les
choses pendant six mois. Si je n'arrive pas à convaincre, je ferai respecter
les choses. » Et de conclure : « Je prendrai mes responsabilités et je ferai
évacuer la zone. »
Dans le JDD du 21 mai, le premier ministre confirme la nomination d’un
médiateur et ajoute : « Il est urgent de baisser le niveau de tension sur ce
dossier. La médiation va nous y aider. Elle durera six mois. » L’important est
ce qui suit : «Nicolas Hulot et moi souhaitons vraiment que toutes les options
soient sur la table. Puis viendra le temps de la décision et la mise en œuvre.
»
Nous, on avait compris que Macron voulait faire respecter le vote,
évacuer la zone et construire l’aéroport. Parions qu’il attendra le résultat de
la "conciliation", qu’il laissera le premier ministre décider en
accord avec Hulot et que s’en sera fini du nouvel aéroport. Pratique d’avoir un 1er ministre de droite et un ministre d’état écologiste !
La confiance n'exclut pas le
contrôle
Le candidat l’avait annoncé, le président l’a décidé. Le gouvernement a
donc lancé un audit des finances publiques. Si un candidat d’opposition avait
gagné on aurait compris qu’il cherche à mettre en exergue les dérives de son
prédécesseur mais faire un audit sur une situation dont on est soi-même
largement responsable ! Car Macron a bien été successivement, avant l'élection,
le principal rédacteur du projet économique du candidat Hollande, puis, à
l'Élysée, le secrétaire général en charge des questions financières, enfin, son
ministre de l’économie jusqu’à quelques mois avant la fin du quinquennat, non
? Cela ne l'empêche pas de s’inquiéter de
la situation financière de la France alors même que la cour des comptes a
annoncé qu’elle était en train de procéder à un tel audit ! Peut-être
redoute-t-il que Hollande ne soit parti avec la caisse et que la cour ne s’en
aperçoive pas ?
L'État, c'est moi !
L'État, c'est moi !
Le président dévoile progressivement le "domaine réservé"
qu'il est en train de se constituer. Il s'agit, bien entendu, des réformes emblématiques de son programme qui feront de
son mandat une réussite ou un échec.
La priorité des priorités est la refonte du code du travail dont il
vient de donner le top départ. Un discours à la nation, une interview avec des
journalistes, la déclaration de politique générale du premier ministre ?
Sûrement pas, il passe directement au concret et tout seul.
Mardi il a reçu les patrons des syndicats de salariés et d'employeurs qui sont venus tout seuls. Lui-même n'était entouré ni du premier ministre ni de la ministre du
travail. Ils interviendront dans un second temps, lors des réunions de travail
avec les partenaires sociaux. Le président tenait à expliquer en tête à tête
avec les leaders syndicaux les grands principes de la réforme et les modalités
de sa mise en oeuvre. Il n'avait donc dans le bureau que deux collaborateurs qui
suivront tout particulièrement le sujet : le secrétaire général de l'Élysée,
Alexis Kohler, son bras droit, et Pierre-André Imbert, le conseiller social de l'Elysée. Tout le monde a
compris que le pilotage du projet sera assuré par la présidence de la
République.
Il fallait d'ailleurs les voir, à leur sortie, les Mailly, Berger, Martinez, Gattaz,
etc. On aurait dit qu'ils avaient vu la vierge !
Après s'être attaqué aux partis politiques,
qu'il a découpés en mille morceaux, Macron va maintenant s'occuper des
syndicats. De fait, il est sur le point de réaliser un exploit historique :
couper FO de la CGT. Ce n'est plus "Mac the Kid", mais "Mack the
Knife"!
"Oh, le
bébé requin, a de telles dents, chérie ...
Et il les
montre, blanc nacré ...
Tu sais que le
requin mord avec ses dents chérie ...
Et il n'y a
jamais, jamais une trace de rouge" (1)
Sur le toit du monde
Cette deuxième semaine a enfin été marquée par l'entrée officielle du
débutant français dans le bal des Grands de ce monde : sommet de l'OTAN jeudi à
Bruxelles et sommet du G7 vendredi et samedi en Sicile.
Il n'y en avait que pour le jeune président
français, objet de tous les regards et centre de tous les égards (il a eu droit
à un déjeuner rien que pour lui avec Trump!). Du coup, il a remis la France,
dont la parole est de nouveau écoutée, au centre du jeu diplomatique. Avec le
canadien Trudeau et l'italien Renzi, il symbolise le renouveau des dirigeants
occidentaux.
Élève Macron vous avez les Encouragements!
En attendant les Félicitations au soir du second tour des élections législatives...
En attendant les Félicitations au soir du second tour des élections législatives...
(1)Tirée de de "l'Opéra de
quat'sous"(1928), la célébrée"complainte de Mackie" a été
popularisée par les plus grands interprètes américains, Louis Amstrong, Ella
Fitzgerald, Frank Sinatra et tant d'autres...
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