Lors des ses fréquents et nombreux entretiens avec les journalistes de
Monde auteurs de " Un président ne devrait pas dire ça…" Hollande révèle
qu’il a ordonné au moins quatre homicides ciblés de terroristes, exécutés par
les services de la DGSE.
L’ouvrage lui-même fait tellement de bruit et de dégâts que ce n’est pas
cette confession qui a été la plus commentée. C’est pourtant une affaire grave
qui soulève trois questions essentielles : morales, politiques et
juridiques.
- Morales : L’abolition
de la peine de mort est la grande fierté du socialisme et Robert Badinter son
héros, qui dans un discours célèbre devant l’assemblée nationale, le 17
septembre 1981 déclarait : « La peine de mort est contraire à ce que
l’humanité depuis deux mille ans a pensé de plus haut et rêvé de plus noble.»
Ce n’est pas le degré d’abomination de l’acte commis ni la barbarie du criminel qui sont en cause, quelles que soient les
circonstances dans lesquels il a été commis, mais l'exécution elle-même. Aussi Badinter prend-il soin de
préciser dans son discours : « Utiliser
contre les terroristes la peine de mort, c’est pour la démocratie, faire sienne
les valeurs de ces derniers. » Il faut croire que Hollande n’écoutait
pas et que Badinter lui-même a dû oublier car on ne l’a guère entendu sur cette
déclaration du président de la République.
- Politiques : Révéler avec une telle légèreté, où perce une forme
de gloriole (Moi président, je n’hésiterai pas à recourir à l’assassinat, au
moins personne n’osera plus dire que je suis mou …), a provoqué évidemment de
violentes réactions.
À droite « Quand on est chef de l’État, on ne tient pas de propos de
ce type. Et il faut bien se mettre dans la tête que la transparence absolue, ça
devient un danger pour la démocratie et la sécurité de nos concitoyens. »
(Alain Juppé).
Au centre : « il y a dans ce livre des affirmations qui
auraient dû demeurer de l'ordre du secret. Quand un président de la République
a la lourde responsabilité de décider l'intervention des services secrets
contre des personnes, ça ne doit pas se retrouver dans un livre … Cette manière
d'exposer la fonction présidentielle n'était pas la bonne. » (François
Bayrou.)
À gauche « La vérité, c’est que c’est un assassinat décidé en haut
lieu. »(Jean-Luc Mélenchon). Et, pour compléter, ce trait d’humour auquel
Jean-Marc Ayrault ne nous avait pas habitué : « Un président ne
devrait pas dire ça ! »
Au-delà de l’application par un gouvernement de gauche de la peine de
mort, il y a dans cette affaire une violation flagrante du secret-défense sur
un sujet d’une exceptionnelle gravité, ce qui constitue, comme nous allons le
voir, une infraction pénale.
-Juridiques : Le code pénal (art.413.10 et 413-11) puni de
sept ou cinq ans d'emprisonnement et de 100 000 ou 75.000 euros d'amende le fait, par toute
personne dépositaire d'un secret de la défense nationale, d'en
donner l'accès à une personne non qualifiée et à une personne qui y a eu accès de le porter à la connaissance
du public. Les deux cas qui nous intéressent (personne qualifiée qui délivre un secret-défense à une personne non qualifiée et personne non qualifiée qui livre ce secret à la connaissance du public) répondent bien aux dispositions du code pénal, non ?
C’est ce que dit le droit français mais il y a peu de chances que cela
ne s’applique à Hollande puisque il est, comme chacun sait, "irresponsable"
(pour les actes commis dans le cadre de ses fonctions…) ; mais pour les
deux journalistes, l’article 413-11, hein ? Bon, ne rêvons pas…
-Au plan international les choses pourraient se compliquer. Écoutons à
nouveau Mélenchon : « Je mets en garde François Hollande. Il ferait
de bien d’y réfléchir … Il y a un problème, il y en aura un bien vite. J’espère
qu’il va démonter ce qu’il y a dans ce livre où il reconnaît des assassinats
ciblés. La vérité c’est que c’est un assassinat décidé en haut lieu … En
principe, ce genre de comportement relève du Tribunal Pénal International, mais
c’est une autre histoire. »
Ne soyons pas naïfs, en effet. Les pays qui pratiquent le crime d’État sont
nombreux mais il y a un problème : pourquoi croyez-vous que les USA, la
Russie, Israël … n’ont jamais signé le traité instituant le TPI ? La France
l’a fait et le Mali aussi (que nous citons tout à fait au hasard !).
Hollande a manifestement oublié une anaphore : « Moi,
Président je ne recevrai pas à l’Élysée des journalistes pour leur faire confier des secrets d’État, le soir autour d’un verre. »
N’étant pas tenu par la même réserve, nous allons nous confesser à notre tour : éliminer des terroristes responsables du massacre de nos
compatriotes ne nous pose pas de problème. Mais un secret
d’État doit rester … secret.
Curieux président qui ne l'a pas compris! Ou qui n'a toujours pas compris qu'il était le chef de l'État…
PS : signalons un livre passionnant sur
le sujet :
"Les tueurs de la République" de Vincent Nouzille (Fayard)
http://www.fayard.fr/les-tueurs-de-la-republique-9782213671765
"Les tueurs de la République" de Vincent Nouzille (Fayard)
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