Ce sera évidemment "le" sujet de la
prochaine campagne présidentielle. Un concours de mauvaise foi et de trucage.
Une question pour l’instant sans réponse.
En France en tout cas, parce
qu’ailleurs on a la réponse : Pour inciter les entreprises à recruter il faut lever les obstacles à l’embauche, c’est-à-dire assouplir le droit du travail
et en baisser les charges. Chez nos voisins, ça marche.
La France, elle s’accroche à son
fameux "modèle social" qui a pour priorité la protection des
travailleurs salariés en contrat à durée indéterminée. L’État, les syndicats,
les inspecteurs du travail, les juges, partagent une même idée fixe : on ne
touche pas aux droits acquis. Hélas, contrairement à toute logique, à toute
morale devrait-on dire, cela ne fonctionne pas et le chômage en France atteint
des niveaux stratosphériques. Il faut agir puisque Hollande a fait de la baisse
du chômage, "durable et continue", la condition de sa candidature à
un second mandat. On va donc avoir recours à la tout aussi fameuse "French
Touch", en français la bidouille.
Puisqu’il faut créer des emplois,
l’État va s’en occuper lui-même : des fonctionnaires et des agents
publics, des emplois d’avenir et stages pour les jeunes, des contrats
de génération pour les vieux, et pour tous la panoplie complète avec les
contrats aidés (d’accompagnement dans l’emploi, de professionnalisation, d’insertion, d’adaptation, etc). L’INSEE
en recense 17 et 545.000 entrées en emplois aidés en 2015 !
Mais Hollande lui-même n’est pas
aidé : la courbe ne s’inverse pas. Pour réduire le nombre de chômeurs
recensés par Pôle emploi on va donc les sortir des catégories sensibles, les demandeurs
d’emplois des catégories A, B et C qui servent de référence, pour les garer
dans ces gigantesques parkings où ils sont à l’abri des regards, c’est à dire
la formation, les stages, le service civique, etc. Hollande vient d’annoncer la mise en place de 500.000 formations supplémentaires dans les prochains mois.
La bidouille n’échappe à personne
mais quand on n’a pas le courage de réformer le droit du travail et qu’on ne
peut multiplier à l’infini les contrats aidés qui sont très onéreux, comment
faire autrement que de tenter de cacher ces chômeurs que l’on ne saurait
voir ?
Sur le fond, on ne peut
qu’approuver le recours à la formation pour les chômeurs d’autant plus que, jusqu’à
présent, les principaux bénéficiaires de la manne des 31 milliards dépensés chaque année pour la
formation ont été les salariés déjà pourvus d’un emploi et les syndicats
eux-mêmes !
Former les chômeurs est
évidemment une priorité. Le problème est l’absence de transparence. On a compris
qu’un chômeur recensé en catégories A, B et C bénéficiant d’une formation est automatiquement
transféré dans la catégorie E qui n’est pas concernée par la promesse de
Hollande.
Évidemment, il n’arrivera pas à faire
entrer 500.000 chômeurs en formation d’ici la fin de son mandat. Certes, il y
aura encore plus de chômeurs à la fin de son mandat que lorsqu’il est arrivé au pouvoir (650.000 de plus aujourd’hui)
mais avec quelques dizaines de milliers de chômeurs en moins il pourra tenter de faire
croire qu'il a réussi son pari. Il jure ses grands dieux que son objectif n’est pas la
bidouille des chiffres du chômage. On veut bien le croire mais la confiance
n’excluant pas le contrôle on aimerait bien savoir combien de personnes sortiront
du radar du chômage parce qu’elles ont été envoyées en formation.
Cela ne devrait pas être
compliqué puisqu’on trouve tout dans les statistiques de Pôle emploi. Rappelons
que cet organisme est sous la tutelle du ministre du travail et qu’il élabore
ses statistiques avec la DARES (Direction de l'Animation de la Recherche, des
Etudes et des Statistiques qui dépend directement du ministre).
Ces statistiques sont pleines
d’informations. Elles sont présentées au travers de différents documents dont vous trouverez le lien hyper texte en renvoi, si le cœur vous en dit....
Prenons, par exemple, celles du mois de janvier 2015, publiées fin février, les
plus récentes donc (1).
D’abord, un communiqué de presse
mensuel (2). Document d’une page où figure tout et seulement ce dont les journalistes ont
besoin pour pondre leur article sans se fatiguer et qui n’iront généralement
pas plus loin.
Les plus consciencieux liront
peut-être le document de référence intitulé : "Dares indicateurs-
Demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi en janvier 2016" (3).
Dès la première page ils
trouveront cette mention bizarre: "En
janvier 2016, le nombre de sorties de catégories A,B et C pour cessation
d’inscription pour défaut d’actualisation a enregistré un rebond
inhabituellement fort, après la baisse observée en décembre, ce qui affecte à
la baisse le nombre de demandeurs d’emploi en catégories A, B et C en janvier.
Sur trois mois l’évolution est plus modérée."
Autre fait troublant : alors
que les statistiques du chômage sont mensuelles, les entrées et sorties des
catégories D et E sont publiées sous la forme trimestrielle. Pourquoi ne pas
utiliser la même présentation ?
Mais ils n’y trouveront pas
toutes les réponses, en particulier celle qui nous occupe : combien de
sorties des catégories A,B et C pour raison d’entrée en Formation ? Pourtant,
on découvre page 9 le détail des sorties des catégories A,B et C par motif. On
approche du but ? Eh bien non, parce que l’on n'y a aucune mention sur la Formation ! Seulement une ligne "Entrée en stage", ce qui n'est pas la même chose.
Consulter le document
méthodologique publié en décembre 2015 (4). On y relève la définition suivante
de la catégorie D : "demandeurs
d’emploi non tenus de faire des actes positifs de recherche d’emploi, sans
emploi. Ils peuvent être en stage ou formation, en maladie, en contrat de sécurisation
professionnelle (CSP)". Merci, on savait déjà, mais on ignore toujours
où est recensée la formation.
Bon, on va s’arrêter là parce
qu’un citoyen qui souhaite être informé n’est pas tenu d’être médecin légiste.
Nous vous épargnerons donc la dissection des chiffres de pôle emploi. Vous
l’aurez compris, ce n’est pas demain que l’on saura si la baisse du chômage est
due à un retour à l’emploi ou à une entrée en formation.et Hollande pourra continuer
à nous enfumer tout à loisir.
Mais nous sommes en droit de nous
demander pourquoi les experts et les journalistes, dont c’est le boulot et qui pérorent
en permanence sur les médias, n’enquêtent pas sur cette question pourtant
essentielle pour l’avenir du président ? La réponse est simple : justement
parce qu’ils passent leur temps derrière les micros et les caméras et n’ont pas
le temps de s’informer vraiment...
Nous ne pouvions en rester là.
Tout ne va pas si mal en France. Il suffit de faire confiance. Alors nous avons
fait quelque chose qui est tout sauf naturel. Nous avons adressé un courriel au
service communication de pôle emploi : "comment est-ce que je fais
pour savoir combien de personnes quittent les catégories A, B, C pour entrer en
formation." Sans espoir évidemment. Quelques minutes plus tard nous avons
reçu un mail nous communicant un lien sur "Les sortants des listes de
demandeurs d’emploi inscrits à Pôle emploi(5). Jackpot ! Bravo au service "com" de Pôle emploi.
Après vérification il apparaît que, primo si l’on parle de sortie pour Formation, on ne trouve plus les
sorties pour Stage. Nous avons alors abusé et demandé si stage et formation, c’était
la même rubrique. La réponse est venue, c'est la même.
En tout cas nous avons découvert
l’essentiel. Il faut attendre sept mois pour avoir la fameuse réponse (les
chiffes de juin 2015 sont publiés en janvier 2016). Ce qui signifie que si
Hollande lance son cocorico fin 2016, en annonçant sa candidature, il faudra
attendre juillet 2017 pour savoir combien de chômeurs disparus avaient été, à cette date, planqués en
formation. Trop tard, le nouveau président aura été élu et cela n'intéressera plus personne ! Mais merci quand même…
(4) https://www.google.fr/url?
sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=2&ved=0ahUKEwjFysiE_L3LAhUBlxoKHS9aAkgQFgghMAE&url=http%3A%2F%2Fwww.pole-emploi.org%2Ffront%2Fcommon%2Ftools%2Fload_file.jspz%3FgalleryId%3D34583%26galleryTitle%3DDocumentation%2Bm%3Fthodologique%2BSTMT&usg=AFQjCNHpyyy9CK0NUsakxPYrXAWQC-TPBg&cad=rja
(5) http://dares.travail-emploi.gouv.fr/dares-etudes-et-statistiques/etudes-et-syntheses/dares-analyses-dares-indicateurs-dares-resultats/article/les-sortants-des-listes-de-demandeurs-d-emploi-inscrits-a-pole-emploi-en-juin-118943
sa=t&rct=j&q=&esrc=s&source=web&cd=2&ved=0ahUKEwjFysiE_L3LAhUBlxoKHS9aAkgQFgghMAE&url=http%3A%2F%2Fwww.pole-emploi.org%2Ffront%2Fcommon%2Ftools%2Fload_file.jspz%3FgalleryId%3D34583%26galleryTitle%3DDocumentation%2Bm%3Fthodologique%2BSTMT&usg=AFQjCNHpyyy9CK0NUsakxPYrXAWQC-TPBg&cad=rja
(5) http://dares.travail-emploi.gouv.fr/dares-etudes-et-statistiques/etudes-et-syntheses/dares-analyses-dares-indicateurs-dares-resultats/article/les-sortants-des-listes-de-demandeurs-d-emploi-inscrits-a-pole-emploi-en-juin-118943
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