Si nous tombons dans le ruisseau,
Hollande est formel, c’est la faute à l’Euro.
Nous nous demandions, dans nos vœux du
1er janvier, comment la France se sortirait de ses engagements
budgétaires alors qu’ils reposaient sur l’hypothèse irréaliste d’une croissance de 0,80% en 2013.
Nous avons maintenant la réponse.
On va effectivement revoir à la baisse
cette prévision mais l’excuse est toute trouvée. Ecoutons le chef de l’Etat. Il
faut, dit-il : « engager l'indispensable réforme du système monétaire
international, car sinon nous demandons à des pays de faire des efforts de compétitivité qui sont annihilés par
la valorisation de l'euro. »
Reformer le système monétaire
international, rien que ça ! Il suffit d’y contraindre l’Allemagne, l’Angleterre,
la Chine, le Japon, les USA… En attendant, Hollande pourra dire que la France
et sa politique n’y sont pour rien. Ses promesses sont impossibles à tenir, c’est
la faute à l’euro…
On veut bien croire qu’il vaut mieux
une monnaie faible qu’une monnaie forte pour exporter. Mais est-ce si simple ?
On peut d’abord se demander pourquoi,
il y a quelques semaines à peine, Hollande se réjouissait de la bonne tenue de
la monnaie européenne qui confirmait, selon lui, la fin de la crise de l’euro,
alors qu’il considère aujourd’hui que c’est mauvais pour la croissance.
Se demander, aussi, pourquoi les
allemands s’accommodent fort bien d’un euro à 1,35 $. Merkel n’aura pas tardé à
contredire Hollande en déclarant que le gouvernement allemand est « convaincu que l'euro n'est pas
surévalué par rapport à sa moyenne historique. » Et son porte-parole
d’enfoncer le clou : « La politique de change n’est pas un instrument
adapté pour améliorer la compétitivité ». Pan sur la France ! Qu’elle commence,
dit-on outre-Rhin, par procéder aux réformes structurelles indispensables et à
réduire ses dépenses publiques.
Comment expliquer, en effet, que
l’Allemagne enregistre un excédent commercial de 190 milliards et la France un déficit de 67 milliards ?
L’euro fort n’explique pas tout puisque quand l’euro était à son sommet, en
2008 (jusqu’à 1,60 $), l’Allemagne avait un excédent de 178 milliards et la
France un déficit de 56 milliards. Et quand il était très bas, en 2010
(au-dessous de 1,20), les chiffres étaient comparables, respectivement +155
milliards et – 52 milliards. Pas de doute, il y a un truc.
Certains économistes ont trouvé
l’explication : l’Allemagne exporte des produits de qualité (deutsche
qualität !), et innovants, tandis que la France propose du moyen de gamme
où la concurrence est plus forte. Pas très agréable à entendre…
Par ailleurs, il ne faut pas oublier
qu’avec un euro fort les importations coûtent moins cher(1). Avec un euro qui vaudrait
un dollar, combien faudrait-il payer le litre d’essence ? 30 à 40 centimes
de plus ? On se souvient du psychodrame de l’automne dernier, lorsque l’Etat avait jugé bon pour faire baisser les
prix à la pompe de consentir un effort budgétaire de 100 millions par mois.
Pour 3 centimes de baisse ! Pour 30 ou 40 centimes, cela pourrait coûter
près de 15 milliards d’euros par an …
Le voilà donc le truc, mais tout le monde connaît : si
une monnaie faible peut soutenir les exportations, elle renchérit les
importations. Or, en France, nous sommes fortement dépendants des importations
pour de nombreux produits de consommation courante ou d’équipement et si l’on
devait les remplacer par du "made
in France" (pour autant que cela soit possible) il faudrait payer
encore plus cher !
Au fond, même si c’est inconscient,
les socialistes regrettent le bon temps où la dévaluation redonnait un peu de
compétitivité sans imposer des réformes impopulaires et où l’inflation- sa
conséquence directe- faisait baisser la charge de la dette. Malheureusement, ou
plutôt heureusement, aujourd’hui, notre dette est libellée en euro et ce n’est
plus nous qui en fixons la parité à l’égard des autres monnaies.
Donc la question de la valeur de
l’euro n’est pas près d’être tranchée. Mais, on l’aura compris, ce n’est pas vraiment
le sujet.
Ce qui compte, c’est d’avoir une bonne
explication lorsque le gouvernement annoncera qu’il revoit ses prévisions de
croissance à la baisse (2) et que, par conséquent, l’objectif de ramener le
déficit budgétaire à 3% du PIB ne sera pas tenu.
Cela tombe bien car, avec le temps qui
passe, il devient de plus en plus difficile d’invoquer le bilan du prédécesseur.
Surtout quand il faut expliquer que les engagements pris, fin 2013, par
l’actuel président, ne seront pas tenus.
(1) en 2012, la
facture énergétique de la France (69 milliards) était supérieure à son déficit
commercial (67 milliards).
(2) Pierre
Moscovici a déjà évalué à 0,30 % du PIB le "coût" de la
hausse de l’euro. Afin de préparer les esprits à une première baisse de la
prévision de croissance de 0,80 à 0,50 % ?
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