Hollande vient de connaître la même
mésaventure que le roi Midas. Non pas qu’il possède, comme le roi de Phrygie, le don de transformer en or
tout ce qu’il touche. Hélas, car nos finances publiques s’en porteraient mieux.La
ressemblance tient plutôt à une particularité physique. Le roi Midas avait de
grandes oreilles, punition infligée par Apollon parce qu’il avait voté pour la
flûte de Pan, contre la lyre du dieu de la musique. Hollande, lui, doit sa
disgrâce à son appendice nasal qui ne cesse de s’allonger depuis que les
français ont voté pour lui, sur une promesse qui se révèle un mensonge.
L’un et l’autre, afin de se protéger
des railleries, avaient érigé en secret d’état leur défaut physique. Mais
impossible d’empêcher la rumeur de courir, la vérité finit toujours par
éclater. Le barbier qui avait découvert les grandes oreilles du roi, se sentant
incapable de garder en lui ce terrible secret, alla l’enfouir dans un champ.
Mais les roseaux alentours, qui l’avaient entendu, le répétèrent à tout vent,
ridiculisant le pauvre Midas.
Pour Hollande, la révélation du secret
fut moins poétique. Elle fut publiée dans le rapport annuel de la Cour des
comptes, tellement ennuyeux qu’il passe généralement inaperçu. Mais le
président de cette institution s’est fait un plaisir d’aller la crier à tout
vent, comme les roseaux de la légende, sur les places publiques.
Le messager de mauvaises nouvelles
connaît souvent une fin tragique. Pas lui. Chacun, à commencer par le monarque
lui-même, opine gravement et le félicite d’avoir eu le courage de dire tout
haut ce que tout le monde savait depuis longtemps. Bizarre !
Le secret de Hollande était un
mensonge. Pas possible, en effet, de parler d’erreur ou d’ignorance compte tenu
de la compétence de l’intéressé et de tous les avis d’experts dont il a
bénéficié. C’est ce mensonge qui a permis au candidat Hollande de se faire
élire président de la République, qu’il a réitéré une fois installé à Élysée et
que tout ce qui compte en socialie, du premier ministre au dernier des élus,
rabâche, en toutes occasions, comme une vérité révélée.
Ce mensonge est structuré comme un
syllogisme irréfutable : ce n’est pas la crise qui est responsable de nos
malheurs, c’est Sarkozy. Donc, une fois la gauche au pouvoir, la confiance
reviendra et les mesures promises par Hollande ramèneront la croissance, ce qui
réduira le déficit budgétaire et résorbera le chômage. Tellement évident que
l’on a même pu en évaluer les effets chiffrés à la décimale près ! La
croissance ? 0,80%. Le déficit : 3% de PIB. Le chômage ? Regardez la courbe qui
s’inverse…
Qu’a dit le barbier de Hollande,
Didier Migaud, premier président de la Cour des comptes ? Des choses vraiment
pas agréables à entendre pour le
pouvoir.
Par exemple, que la situation de
la France en 2012 est moins bonne que
celle de la moyenne de l’Union européenne. Que si des économies ont bien été
réalisées, elles sont dues, pour une part non négligeable, aux mesures prises sous la législature
précédente. Que les prévisions de recettes du Gouvernement pour 2013 sont trop
optimistes.
Mais surtout, et c’est la révélation
du secret d’état, que l’engagement des 3% et donc ceux qui en découlent ne
seront pas tenus.
Après tout, la Cour est dans son rôle
quand elle juge les politiques publiques. Également, quand elle émet un avis,
tel que celui-ci : la priorité absolue est désormais d’intensifier les
économies… l’effort prévu pour 2013 est déséquilibré car il repose pour moins
de 25 % sur la maîtrise des dépenses et pour plus de 75 % sur des hausses
d’impôts…
Mais Didier Migaud va beaucoup plus
loin quand il explique au gouvernement ce qu’il doit faire. Le voilà qui
déclare qu’il faut fiscaliser les allocations familiales, geler les retraites, poursuivre le travail
de réduction des niches fiscales, réduire les aides aux
entreprises…sans parler de tous ses projets pour maitriser les dépenses des
collectivités locales et limiter les dépenses de santé. Son credo : « L’essentiel de l’effort doit porter sur les
dépenses. Des économies sont possibles sans remettre en cause le modèle social
français.» C’est clair et courageux !
Au fond, c’est la déclaration de
politique générale que nous aurions aimé entendre du premier ministre.
Du premier ministre ? Mais, c’est bien
sûr, le voilà le prochain premier ministre de Hollande ! Ce n’est pas pour tout
de suite, il faut attendre que la gravité de la situation se soit imposée à sa
propre gauche et que l’Europe ait remonté les bretelles de la France. Que
l’heure des sacrifices ait vraiment sonné. Que le moment soit venu, comme dans
d’autres pays malades, de faire appel à un technicien pour administrer le
remède de … cheval qu’aucun politique n’oserait prescrire, bref d’aller
chercher un Mario Monti français.
Qui mieux que Migaud pourrait tenir le
rôle ? Que ce socialiste compétent, unanimement apprécié par ses camarades, qui
a été un très respecté président de la commission des finances (imposé par
Sarkozy qui souhaitait que cette importante commission parlementaire soit
dirigée par un député de l’opposition) avant d’être nommé (par Sarkozy
toujours) à la tête de la Cour des comptes où il a fait preuve de courage et
d’indépendance. A l’époque, la droite n’avait pas vraiment apprécié mais
aujourd’hui la gauche ne bronche pas(1).
Hollande, lui-même, n’a montré aucun
agacement, pas la moindre réserve, ni lancé la moindre blagounette. S’il n’a pu
s’empêcher d’en faire une, douteuse, sur le pape, il pourrait bien, en
revanche, s’inspirer du pouvoir dont dispose ce dernier de nommer
secrètement un cardinal (il conserve sa
décision " in pectore ", en son sein, tant que les circonstances
l’exigent).
Cela pourrait bien être le cas de
Didier Migaud qui serait le" primus minister in pectore" de Hollande.
Ou alors, pour ceux qui trouveraient cette référence catholique trop ringarde,
" l’imam caché ", le sauveur attendu …
(1)
Enfin, pas officiellement et pas toute la gauche… Cahuzac, par exemple : « La cour des comptes
est parfaitement légitime pour juger de l’efficience et des coûts des
politiques menées. Est-elle dans son rôle en indiquant ce qu’il faudrait faire
en lieu et place d’un gouvernement investi et de députés élus ? » Finement
dit, mais attendons que les autres, ceux qui briguent Matignon, aient compris
la menace…
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